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Elevage et sport : main dans la main vers un avenir prometteur

17 mai 2023 16:00

Même si, à première vue, les deux termes ont peu de points communs, aucun des deux ne pourrait exister sans l’autre : l’élevage de chevaux et les sports équestres. En effet, l’élevage suisse de chevaux de sport récompense les étalons et juments qui (ou dont les parents) ont fait leurs preuves dans le monde du sport. C’est aussi pourquoi les jeunes chevaux sont soigneusement préparés à leur futur métier d’athlètes via les épreuves d’élevage et jeunes chevaux.

Les « reines de beauté » sont la plus grande fierté de leurs éleveurs. | © Katja Stuppia Les « reines de beauté » sont la plus grande fierté de leurs éleveurs. | © Katja Stuppia

Le printemps est une saison palpitante pour les éleveurs : les nuits précédant les poulinages sont courtes et les moments de bonheur d’autant plus beaux lorsque des poulains vigoureux couchés sur la paille parviennent enfin à se tenir sur leurs jambes encore frêles pour téter le lait de leur mère. Mais c’est également le moment de réfléchir à la prochaine génération. Quel étalon convient à quelle jument et permettra d’obtenir le poulain idéal doté, si possible, des qualités sportives espérées ? Et c’est aussi au printemps qu’ont lieu les tests en terrain des jeunes chevaux de 3 ans - un premier indicateur en vue de leur future carrière sportive.

Pour un grand nombre de cavaliers, les tests en terrain sont alors l’occasion de s’assurer une relève. Ils peuvent ici entrer en contact avec des éleveurs et des entraîneurs, observer les jeunes chevaux et conclure des accords - ou encore décider de suivre leur évolution la saison suivante lors des épreuves pour jeunes chevaux.

Ces épreuves d’élevage et de sport sont importantes pour l’un et l’autre de ces domaines. Mais comment sont-elles organisées et quels sont les changements prévus pour la saison 2023 ?

 

Test en terrain et Swiss Breed Classic : toujours en douceur avec les jeunes chevaux !

En Suisse, les tests en terrain représentent la seule possibilité pour les chevaux de sport de 3 ans de se montrer en public dans leurs disciplines de prédilection. Ces épreuves sont organisées sous l’égide de la Fédération d’élevage du cheval de sport CH (FECH). La deuxième fédération d’élevage suisse de chevaux demi-sang, Cheval Suisse, ne connaît actuellement pas de telles épreuves d’élevage.

Des considérations liées à la protection animale ont poussé la FECH à maintenir cette formule. La situation est différente en Allemagne, par exemple, où les jeunes chevaux de 3 ans peuvent déjà participer à des épreuves de sport. « Nous estimons qu’il est important de donner aux jeunes chevaux le temps de se développer. A cet âge, ils ne devraient pas sortir plus de trois fois en concours », explique Anja Lüth, la responsable du stud-book de la FECH.

Lors des tests en terrain, deux juges évaluent l’extérieur du cheval, les allures de base sous la selle ainsi que le saut en liberté (technique, aptitude et qualité du saut). Ces trois épreuves partielles fournissent des informations sur les prédispositions génétiques et naturelles des jeunes chevaux. L’épreuve sous la selle (allures de base) se déroule par groupe de deux à quatre chevaux. Des allures naturelles, correctes et amples sont souhaitées. Le niveau de formation n’est pas pris en compte dans la note.

Sont admis aux tests en terrain tous les chevaux de sport de 3 ans dotés de documents d’identification de la FECH. Chez les juments devant être inscrites au stud-book de la FECH à des fins d’élevage, les 3 ans d’autres régions d’élevage peuvent également participer aux tests.

Les meilleurs 3 ans de l’ensemble des tests en terrain s’affrontent alors lors du Swiss Breed Classic qui, en 2023, aura lieu à Aadorf. Les chevaux se qualifient ici dans l’épreuve partielle des allures de base et/ou du saut en liberté. Les propriétaires de chevaux particulièrement talentueux sélectionnés pour les deux épreuves partielles doivent alors choisir l’une d’entre elles. Enfin, la crème de la crème des chevaux de saut de 3 ans est finalement présentée à la scène internationale lors d’une épreuve de saut en liberté qui a lieu à la fin de l’année dans le cadre du CHI de Genève

Lors du test en terrain, la réaction du cheval pendant la montée et la descente du cheval est également évaluée. | © Katja Stuppia Lors du test en terrain, la réaction du cheval pendant la montée et la descente du cheval est également évaluée. | © Katja Stuppia

Juments sélectionnées CH : miroir, mon beau miroir ...

Des juments de qualité font la fierté de tout éleveur, mais sont également une base essentielle pour un élevage durable. C’est pourquoi la FECH décerne chaque année le titre de « jument sélectionnée CH » aux meilleures juments de 3 et 4 ans. Seules les juments dotées de documents d’identification de la FECH et remplissant les exigences strictes en matière d’origines ainsi que d’extérieur et de performances (résultats des tests en terrain pour les 3 ans ou des épreuves de promotion pour les 4 ans) sont admises aux concours des juments sélectionnées CH.

Cette épreuve d’élevage consiste à juger l’extérieur des juments à la main. En fonction de leurs origines, elles sont réparties en juments de dressage ou de saut. La jument ayant obtenu la meilleure note finale est alors sacrée « Miss Suisse ».

 

Elite Suisse : des gènes de sportives pour l’élevage

La plus haute distinction que puisse obtenir une jument d’élevage en Suisse est le titre « Elite Suisse ». Celui-ci peut être demandé par l’éleveur ou le propriétaire d’une jument de 3 ans et plus auprès de la FECH. Pour obtenir ce titre, les conditions à remplir concernant les performances sportives de la jument elle-même, de ses parents ou collatéraux et/ou de ses descendants sont particulièrement strictes.

La demande du titre « Elite Suisse » est gratuite pour toutes les juments inscrites ou devant être inscrites pour l’élevage auprès de la FECH.

Dans les épreuves pour jeunes chevaux, on peut aussi prendre le temps de montrer un obstacle à son cheval. | © Katja Stuppia Dans les épreuves pour jeunes chevaux, on peut aussi prendre le temps de montrer un obstacle à son cheval. | © Katja Stuppia

L’importance des épreuves jeunes chevaux pour l’élevage

A partir de 4 ans, les jeunes chevaux ont la possibilité de participer à des épreuves adaptées à leur âge. Pour de nombreux jeunes chevaux, c’est à ce moment que commence la spécialisation obstacle ou dressage. L’organisation et le déroulement de ces épreuves sont standardisés et adaptés aux besoins particuliers des jeunes chevaux. Beaucoup connaissent ces épreuves sous le nom « d’épreuves de promotion ».

En saut, les épreuves jeunes chevaux sont prises en considération dans l’estimation de la valeur d’élevage, les performances étant toutefois corrigées selon un algorithme compliqué tenant compte des « facteurs environnementaux » cavalier, épreuve et sexe. Cela permet de garantir le calcul de la valeur génétique réelle de l’animal et d’éviter que des cavaliers très expérimentés mettent en avant des chevaux qui, en réalité, seraient peu précieux pour l’élevage. Afin d’assurer une comparaison réelle sur les différents terrains de concours, la conception du parcours des épreuves jeunes chevaux est définie de manière relativement précise et le niveau de difficulté augmente progressivement au cours de la saison. Les constructeurs de parcours jouent ici un rôle important et portent une grande responsabilité. Le constructeur de parcours, Hans Zbinden, en est bien conscient : « Les épreuves jeunes chevaux servent de formation de base et les parcours doivent donner confiance aux chevaux. Il est donc important d’opter pour un tracé harmonieux et fluide avec beaucoup de place entre les sauts. Les obstacles doivent être engageants et faciles à aborder avec un front le plus large possible. » Gérard Lachat, également constructeur de parcours au niveau international, confirme et ajoute : « Afin d’obtenir un bon effet d’apprentissage, le niveau de difficulté pour les jeunes chevaux doit augmenter progressivement, et ce aussi bien au cours du parcours que durant la saison. En outre, il faut varier les obstacles afin de permettre aux jeunes chevaux d’acquérir le plus d’expérience possible au fil du temps. Dans les épreuves jeunes chevaux, la notion de formation est plus importante que les résultats. »

Chez les 4 ans, le parcours n’est en outre pas chronométré - seules les fautes sont prises en compte dans le classement. Le chronométrage n’est autorisé qu’à partir des épreuves réservées aux 5 ans : ici, il est possible d’organiser des parcours avec ou sans chronomètre.

Et où se situe la Suisse en comparaison internationale ? Gérard Lachat explique : « Jusque chez les 5 ans, le niveau en Suisse est comparable au niveau international. Après, l’écart a tendance à se creuser et les chevaux suisses sont distancés. Cela n’a toutefois rien à voir avec la qualité des chevaux, mais plutôt avec les formats des concours. Dans les concours internationaux, les jeunes chevaux participent à une seule épreuve par jour, mais plusieurs jours de suite, et ce avec une augmentation constante du niveau de difficulté. Si on est sur place pendant une semaine, on peut faire progresser les chevaux rapidement et très efficacement. En Suisse, en revanche, on observe souvent que les éleveurs hésitent à investir dans la formation de leurs jeunes chevaux et préfèrent confier leur éducation à un amateur. Celui-ci ne participera généralement pas à de telles manifestations internationales et le cheval sera donc formé de manière moins ciblée. »En dressage, lors de l’évaluation des épreuves jeunes chevaux, l’accent est également mis sur les prédispositions des chevaux et non sur le niveau de formation. Les juges ne se concentrent pas sur les différentes figures mais attribuent cinq notes : une pour le pas, une pour le trot, une pour le galop, une pour l’aptitude à la monte et une pour l’impression générale. Pour de nombreux juges, cela représente un véritable défi, comme le souligne Barbara von Grebel, cavalière de dressage, entraîneuse de jeunes chevaux et membre de la commission technique Dressage de la FSSE : « Chez les jeunes chevaux, le jury évalue les animaux en fonction de leurs prédispositions pour le dressage. Les critères ne sont pas les mêmes que pour les autres épreuves de dressage où la précision de l’exécution des mouvements, et donc le niveau de formation, joue le rôle principal. Chez les jeunes chevaux, d’autres facteurs, tels que les allures, le type, la souplesse, l’harmonie entre le cheval et le cavalier, sont au premier plan - en bref, l’aptitude au dressage. »

Les jeunes chevaux de dressage sont encore en train d’apprendre et doivent aussi pouvoir visiter les alentours du carré de dressage en bonne compagnie. | © Katja Stuppia Les jeunes chevaux de dressage sont encore en train d’apprendre et doivent aussi pouvoir visiter les alentours du carré de dressage en bonne compagnie. | © Katja Stuppia

Les chevaux suisses parmi l’élite mondiale

Un coup d’oeil au classement de la Fédération mondiale de l’élevage des chevaux de sport (World Breeding Federation for Sport Horses, WBFSH) montre que les éleveurs suisses font un excellent travail. En obstacle, le stud-book plutôt modeste des chevaux de sport suisses de la FECH est classé 16e sur 60 fédérations à travers le monde. En dressage et en concours complet, la FECH s’assure une place dans la part de 40 % des meilleurs stud-books. Le meilleur cheval d’obstacle dans le classement 2022, Blues d’Aveline CH, connaît un grand succès au niveau international sous la selle de l’Allemand Gerrit Nieberg. Le couple a notamment remporté la prestigieuse Coupe du monde de saut d’obstacles de cette année au CSI de Leipzig. En concours complet (Toblerone CH monté par Nadja Minder) et en dressage (Delioh von Buchmatt CH monté par Carla Aeberhard), les meilleurs chevaux suisses sont également présentés sur la scène internationale par des cavalières suisses. La responsable du stud-book de la FECH, Anja Lüth, est convaincue : « Nous n’avons aucune raison de nous cacher avec nos chevaux ! Si le classement était pondéré en fonction de l’importance du stud-book, la Suisse ferait vraiment partie de l’élite ! Les chevaux suisses sont élevés pour le sport et préparés au haut niveau de manière ciblée grâce à des épreuves d’élevage et de sport bien conçues. »

Et il ne faut oublier que les carrières sportives commencent toujours dans les écuries d’élevage ! Les éleveuses et éleveurs ainsi que toutes les personnes impliquées dans l’élevage et la formation des jeunes chevaux pour faire de nos animaux des athlètes accomplis méritent donc toute notre reconnaissance.

Cornelia Heimgartner

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