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Dossier: Science des équidés

Le pouvoir fascinant des fascias

30 octobre 2022 23:59

Votre cheval est difficile à assouplir, à mal au dos ou à des adhérences cicatricielles? Vous vous sentez raide et avez des douleurs? Le fascia est peut-être le tissu conjonctif à blâmer!

Le travail gymnastique avec des barres au sol favorise l’extension de la ligne dorsale et représente un excellent moyen d’augmenter la fonctionnalité des facias dans tout le corps. | © imago Le travail gymnastique avec des barres au sol favorise l’extension de la ligne dorsale et représente un excellent moyen d’augmenter la fonctionnalité des facias dans tout le corps. | © imago

Le fascia est une structure du corps passionnante et clé pour la santé et le bien-être. Les fascias soutiennent, rembourrent, lient, séparent et stabilisent chaque structure du corps qu’il soit humain ou équin.

Pour appréhender le système fascial, sa complexité et ses fonctionnalités, il faut pousser les barrières de la doctrine classique. C’est une approche qui demande de sortir de la vision simpliste et réductionniste que le corps fonctionne en unités isolées et de façon linéaire. Nous devons nous orienter vers une pensée systémique et tridimensionnelle. Le cadre étant posé, entrons dans le vif du sujet.

 

Le fascia, c’est quoi?

Le fascia traverse l’organisme des humains et des chevaux comme une toile d’araignée tridimensionnelle. C’est une membrane fibroélastique qui selon sa localisation et ses devoirs sera plus dense (tendon) ou plus lâche (paroi de l’estomac).

Il est omniprésent dans le corps. Et oui, vous avez bien lu, le fascia représente une continuité tissulaire sans interruption. Il est partout, de la tête aux pieds, de la superficie à la profondeur allant jusqu’à l’enveloppe de la cellule. Il forme un réseau en trois dimensions qui relie et pénètre toutes les structures du corps. On le retrouve dans et autour de nos muscles, de nos tendons, de nos organes, de notre cerveau, etc. Il soutient nos os et nos organes. Bref, il est partout!

Les fascias ressemblent à la peau blanche d’une orange qui enveloppe et pénètre le fruit entier: 1) peau , 2) fascia superficiel et tissu adipeux, 3) fascia profond qui enveloppe les muscles et les fibres musculaires, 4) fascia qui couvre les nerfs, les artéries, les vènes, les vaisseaux lymphatiques et les organes, 5) moelle épinière et système nerveux central | © Shutterstock Les fascias ressemblent à la peau blanche d’une orange qui enveloppe et pénètre le fruit entier: 1) peau , 2) fascia superficiel et tissu adipeux, 3) fascia profond qui enveloppe les muscles et les fibres musculaires, 4) fascia qui couvre les nerfs, les artéries, les vènes, les vaisseaux lymphatiques et les organes, 5) moelle épinière et système nerveux central | © Shutterstock

A quoi servent les fascias, quels sont leurs rôles?

Pour mieux comprendre l’utilité des fascias, nous allons faire appel à votre imagination ou à un de vos souvenirs de cavalier. Visualisez ce cavalier sur la piste, en parfaite symbiose avec son cheval. Une communication fluide et continue entre les deux athlètes. Le cavalier réajuste à l’instant précis et au millimètre sa position en contractant certains muscles et en relâche d’autres. Il ressent l’énergie et la puissance que dégage son cheval sous la selle et il ajuste en continu ses aides. Le tout en ressentant la chaleur du soleil sur sa peau. Quant au cheval, il sait exactement où poser chaque sabot, comment coordonner et réaliser le mouvement en fonction de la demande de son cavalier. Il ressent la pression de la botte sur ses flancs, l’action de rêne dans sa bouche et l’influence de la bascule d’équilibre de son cavalier.

Comment cela est-il possible? Grâce aux fascias. Ils participent à la perception des sensations: position du corps, douleurs, intéroception, etc. Ils nous aident à situer notre corps dans l’espace pour enclencher, coordonner et orienter nos mouvements (proprioception). Sans les fascias, le cheval comme le cavalier seraient deux pantins désarticulés qui ne seraient même pas où sont leurs jambes. Ils jouent donc un grand rôle pour la transmission de la puissance et la coordination du mouvement.

Ils ont encore bien d’autres rôles. Au début de l’article, nous mentionnons qu’ils sont partout. Il faut visualiser les fascias comme la colle qui permet de maintenir toutes les parties du corps ensemble pour en faire une unité individuelle et continuelle. Sans eux, le corps serait une flac par terre. Donc leur deuxième travail: faire tenir les «éléments» du corps ensemble.

Et ce n’est pas tout! Ils ont d’autres rôles passionnants et indispensables. En effet, ils dialoguent de manière continue avec notre système nerveux. C’est l’organe sensoriel par excellence. Les fascias absorbent le stress (physique et émotionnelle). Autrement dit, ils amortissent les chocs et protègent les structures du corps. En effet, ils sont dynamiques et s’adaptent en permanence aux contraintes imposées. Ils permettent donc un équilibre subtil de tension et de compression, donnant au corps une stabilité tout en permettant le mouvement. C’est ce qu’on appelle le principe de tenségrité. Le principe de tenségrité permet de comprendre les chaînes de compensation lors d’une blessure. En effet, la stabilité, la tension, la fixation, la résilience, la compensation posturale sont distribuées le long des fascias et sont la source des chaînes lésionnelles.

La «toile d’araignée» des fascias sous le microscope | © Shutterstock La «toile d’araignée» des fascias sous le microscope | © Shutterstock

Un organe de communication propre au corps

Au vu de ses propriétés et interactions, le système fascial est considéré comme un organe mécano-sensoriel et biologique à part entière. Cela signifie qu’il a des fonctionnalités et des aptitudes qui lui sont propres.

Voici une explicitation très simpliste et raccourcie:

  • Mécanique: Les fascias peuvent se contracter et cela indépendamment des muscles ou organes qu’ils entourent.
  • Sensoriel: Les fascias sont pourvus de capteurs et de terminaisons nerveuses permettant de dialoguer avec le système nerveux, de sentir la chaleur, la douleur, les mouvements, etc.
  • Biologique: Les fascias influencent directement les réponses cellulaires via le principe de mécanotransduction. Ce principe signifie que la cellule va transformer le signal mécanique donné via une tension/pression appliquée par le fascia sur sa membrane en une information biochimique (hormone, enzyme, etc.). La biochimie du corps s’adapte donc en fonction des contraintes appliquées par le fascia.

Une équitation harmonieuse promeut la capacité de glissement et la résistance des fascias; les mouvements sont élastiques et stables. | © Shutterstock Une équitation harmonieuse promeut la capacité de glissement et la résistance des fascias; les mouvements sont élastiques et stables. | © Shutterstock

Quelles sont les causes qui endommagent les fascias?

Le fascia peut s’endommager par une surcharge d’entraînement, phases de repos insuffisantes, un équipement mal adapté, une mauvaise posture forcée, lors d’un traumatisme (choc, cicatrisation, etc.) ou encore lors d’une mauvaise hygiène de vie.

Les fascias s’abîment et peuvent créer des douleurs aussi lorsqu’il y a une période d’immobilité après une blessure ou par manque d’exercice.

Et pour terminer, le fascia est extrêmement sensible au stress. Le tissu se resserre et se contracte lors de période de stress prolongée. Il y a une liaison entre le corps et l’émotion.

Les soins en fasciathérapie permettent de libérer les traumas, diminuer le stress, soulager la douleur, améliorer la mobilité et ainsi optimiser la régénération du patient humain comme équin. Sur ce point, il existe plusieurs thérapies pouvant aider les fascias tels que l’acupuncture, le Rolfing, l’ostéopathie, etc. Nous en parlerons dans la deuxième partie de cet article qui sera publié mi-décembre 2022 dans la prochaine édition du «Bulletin».

Suzanne Maibach

Suzanne Maibach au travail: la thérapie manuelle des fascias permet de libérer des tensions et d’augmenter l’amplitude des mouvements dans le corps entier. | © Soraya Exquis Gloor Suzanne Maibach au travail: la thérapie manuelle des fascias permet de libérer des tensions et d’augmenter l’amplitude des mouvements dans le corps entier. | © Soraya Exquis Gloor

A propos de l’auteur
Suzanne Maibach est fasciathérapeute agrée ASCA - RME avec certificat OrTra TC. Elle exerce son activité avec les patients humains dans le cabinet de physiothérapie «En Equilibre» à Morges (VD) et avec les patients à quatre sabots dans leur écurie partout en Suisse romande.

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