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«Rien qu’une demoiselle». Un chapitre de l’histoire de la FSSE vécu par une Genevoise à Berne

11 février 2020 09:00

En 1974, Arlette Howald-Blanche découvre une annonce dans un journal local de la région bernoise qui marquera la vie professionnelle et privée de la jeune femme. Dans cette annonce, la Fédération Suisse des Sports Equestres cherchait quelqu’un pour rédiger le «Bulletin» en français et en allemand. Aujourd’hui, 46 ans plus tard, elle traduit le livre d’anniversaire «120 ans de sport équestre en Suisse» pour la FSSE.

Jeune fille, elle devait se décider entre le piano et le cheval. Encore aujourd’hui, le piano est un des grands plaisirs d’Arlette Blanche. ©FSSE/C.Heimgartner Jeune fille, elle devait se décider entre le piano et le cheval. Encore aujourd’hui, le piano est un des grands plaisirs d’Arlette Blanche. ©FSSE/C.Heimgartner

«Bulletin»: Ça fait maintenant plus de 45 ans que vous entretenez des liens professionnels plus ou moins étroits avec notre fédération. Difficile de s’en débarrasser?

Arlette Blanche: Pas du tout! Avec la fédération et les sports équestres, c’est le grand amour. Je me souviens encore de mon entretien d’embauche en 1974. C’était en revenant de la piscine d’Ostermundigen près de Berne que je me suis arrêtée au secrétariat situé au Blankweg 70 à Ostermundigen pour discuter avec le secrétaire général, René Pezold. Il m’a donné deux ou trois textes à traduire et il en était satisfait. Mes enfants étaient encore petits, mais j’avais envie de travailler. Il fallait cependant trouver un boulot que je pouvais faire à la maison. Ainsi, j’étais responsable de la rédaction française et allemande du «Bulletin» jusqu’au milieu des années 1980. A l’époque, nous publiions dans le «Bulletin» les résultats sportifs, le registre des chevaux de sport ainsi que des textes de règlements et d’autres petites communications. C’était un travail vraiment sympathique et avec le chef, René Pezold, la collaboration était vraiment agréable.

Ensuite, l’assistante de René Pezold a quitté son poste pour fonder une famille. Comme mes enfants étaient déjà plus grands, j’ai pu reprendre son travail et intégrer l’équipe du Blankweg à 100%.

Combien de personnes travaillaient au secrétariat à l’époque?

Nous étions en général neuf personnes: une personne qui s’occupait des passeports des chevaux, une pour le registre des chevaux, une pour les licences, une pour les avant-programmes, une pour les départs à l’étranger, une pour la comptabilité, une pour l’ordinateur - la grande nouveauté technique de l’époque - et puis il y avait le secrétaire général et moi.

A une certaine période, notre petit groupe du secrétariat comprenait même quatre Romandes sur neuf, un véritable record, sans compter notre chef, un Zurichois à la sensibilité très romande puisqu’il avait fait des études à Lausanne et au Tessin. C’était une période très agréable.

Comme notre travail nous plaisait vraiment et que nous étions bien traitées, nous nous impliquions beaucoup. Ça ne nous dérangeait pas d’aller travailler un samedi ou un dimanche lorsqu’il y avait vraiment beaucoup à faire. Nous avons même repeint nos bureaux nous-mêmes parce que le comité ne nous avait pas accordé l’argent nécessaire pour mandater des professionnels!

D’ailleurs, nous avions le droit de prendre nos chiens au bureau. Durant un certain temps, j’avais un teckel à poil dur, ma collègue et copine Catherine Dégallier avait son Norfolk terrier et René Pezold avait un dalmatien.

Et puis nous avons rencontré de véritables personnages! Par exemple le Prince Philip d’Angleterre. Lorsqu’il était président de la FEI, il était venu à Berne pour l’assemblée des délégués et ils ont mangé la choucroute au restaurant «Zunft zu Webern» dans la vielle ville de Berne!

En 1991, René Pezold fête avec ses collaboratrices les 25 ans de fonction en tant que secrétaire général: (d. g. à d.) :Anita Zimmerli, Elisabeth Lehmann, Danielle Winzenried, Amy Feller, Heidi Schneider, René Pezold, Arlette Blanche, Catherine Dégallier, Ursula Bangerter, Christina Riesen. ©Archives FSSE En 1991, René Pezold fête avec ses collaboratrices les 25 ans de fonction en tant que secrétaire général: (d. g. à d.) :Anita Zimmerli, Elisabeth Lehmann, Danielle Winzenried, Amy Feller, Heidi Schneider, René Pezold, Arlette Blanche, Catherine Dégallier, Ursula Bangerter, Christina Riesen. ©Archives FSSE

Et avec les cavaliers et les officiels, etc. les relations étaient bonnes aussi?

Nous étions très souvent au téléphone ou bien les gens passaient au secrétariat. Nous les connaissions tous! Ce contact humain, c’était un des points forts de ce travail. Nous recevions très souvent des petites attentions pour nous remercier.

Bien sûr, les critiques, il y en avait toujours et il y en aura toujours. La fédération voulait que les juges soient plus sévères, il fallait introduire de nouveaux règlements, etc. Donc déjà à l’époque, certains cavaliers avaient l’impression que nous ne travaillions pas dans leur intérêt et que tout ce que nous faisions était uniquement destiné à les brimer. Alors pour certains, à l’époque comme aujourd’hui, tout ce qui est mal vient de Berne. C’est comme en politique …

Par ailleurs, à cette époque et à part le chef, nous n’étions que des femmes au secrétariat et les personnes qui nous contactaient était souvent d’anciens militaires. Ils refusaient parfois de ne parler qu’à une «demoiselle» en exigeant de parler au chef et seulement à lui. Suite à cela, René Pezold avait écrit un article intitulé «Rien qu’une demoiselle» qui soulignait le fait que si nous, les femmes, répondions au téléphone, c’est parce que nous savions de quoi nous parlons et qu’il nous faisait confiance. C’était un bon chef qui nous soutenait toujours.

Grâce à lui et à son excellent style d’écriture, j’ai considérablement pu améliorer mon allemand, ce qui m’a beaucoup aidée dans ma carrière professionnelle.

Arlette Blanche à son bureau au secrétariat en 1991. Le poney passait au secrétariat en raison de la fête des 25 ans de service du secrétaire général René Pezold. ©Roland von Siebenthal Arlette Blanche à son bureau au secrétariat en 1991. Le poney passait au secrétariat en raison de la fête des 25 ans de service du secrétaire général René Pezold. ©Roland von Siebenthal

Vous êtes restée au secrétariat de la fédération jusqu’en 1991. Etait-ce la fin d’une belle «histoire d’amour»?

Oui car ce n’est pas de gaîté de coeur que j’ai décidé de quitter le secrétariat. Avec certaines collègues du secrétariat, et plus particulièrement avec Catherine Dégallier, Danielle Winzenried et Jacqueline Rhis, sans oublier René Pezold, nous sommes encore amis aujourd’hui et nous continuons à nous voir régulièrement. C’est vraiment sympathique.

Après la fédération, j’ai travaillé à l’Association suisse des transports routiers (ASTAG) pendant dix ans en tant que responsable de différents groupes professionnels. D’ailleurs, j’étais la première femme à endosser un tel poste dans ce milieu très masculin! Ensuite, j’ai été en charge de l’administration à la Swiss Football League jusqu’à ce que ce poste soit supprimé suite à des restructurations. C’était des postes très intéressants qui m’ont beaucoup apporté, mais le travail à la fédération est resté quelque chose d’exceptionnel pour moi.

Quelques années avant ma retraite, j’avais envie de faire autre chose et j’ai passé ma patente de restaurateur en me disant: «On ne sait jamais!» et pendant quelque temps, j’ai eu le plaisir de m’occuper de l’administration de la «Brasserie Bärengraben». C’est à cette période que la fédération m’a recontactée pour me demander si je pouvais faire des traductions pour le secrétariat. Alors j’ai renoué avec mon «vieil amour».

Les collaboratrices du secrétariat en 1986: (d. g. à d.):Arlette Blanche, Brigitta Gass, Danielle Winzenried, Annette Käppeli, Margit Ruprechter, Elisabeth Lehmann, Catherine Dégallier, Christina Tobler ©Archives FSSE Les collaboratrices du secrétariat en 1986: (d. g. à d.):Arlette Blanche, Brigitta Gass, Danielle Winzenried, Annette Käppeli, Margit Ruprechter, Elisabeth Lehmann, Catherine Dégallier, Christina Tobler ©Archives FSSE

A part le travail, quels sont vos liens avec les chevaux et les sports équestres?

Quand j’étais petite, je voulais faire du cheval. Ces animaux me fascinaient et je les dessinais tout le temps. A l’époque, je faisais déjà du piano et mon père m’a dit: «C’est soit le cheval, soit le piano.» Or, un piano est nettement plus pratique qu’un cheval … Le choix était donc vite fait. Mais quand j’étais enfant à Genève, avec l’école, nous allions toujours regarder les concours hippiques au Palais des Expositions. J’avais adoré ça!

Après l’école primaire et l’école secondaire à Genève, j’ai suivi l’école de commerce et je suis ensuite partie à Berne pour travailler tout en perfectionnant mon allemand.

C’est à ce moment-là que j’ai rencontré mon futur mari et je suis restée à Berne pour élever mes deux enfants, un fils et une fille.

Durant toute ma vie, je suis montée au plus trois fois à cheval. Par contre, la fascination pour ces belles créatures est restée jusqu’à aujourd’hui.

En ce moment, vous traduisez le livre d’anniversaire de la FSSE «120 ans de sport équestre en Suisse» pour la fédération. Qu’est-ce que ça vous fait de traduire en quelque sorte une partie de votre propre vie?

C’est vrai que c’est un peu spécial, mais c’est aussi très sympathique parce que je connais beaucoup de gens et j’ai vécu certains événements historiques mentionnés dans le livre. Par ailleurs, c’est un vrai défi de traduire les textes de Max E. Ammann. En tant qu’auteur de nombreux ouvrages, il a son propre style et il est important de le respecter autant que possible en français, raison pour laquelle les textes en français présentent quelquefois un style un peu inhabituel.

Ce travail sur le livre d’anniversaire me replonge dans mes souvenirs et même si certains sont moins bons que d’autres, seuls les bons souvenirs restent et c’est très bien ainsi!

Interview réalisée par
Cornelia Heimgartner

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